Je suis la terre, territoire de moi les hommes ont fait. Terre promise mais jamais due. Je suis pays, je suis ville-monde. Je suis électrique, meurtrie et électriquement meurtrie. Je l'ai voulue. J'ai payé. La colère gronde, j'ai trop aimé. J'ai trop aimé l'humain, il a trop aimé me détester à s'en écœuré. Décorée, je suis poussière. J'ai abandonné. Je ne sais plus pourquoi, peut-être ne l‘ais-je jamais su, mais mes enfants ont craché sur les sacrements. L’ordre des choses a tourné. Le saint Graal est devenu la pitié, aussi rare qu’un homme sans pouvoir. Pour l'acquérir, ils ont tué, puni, banni, ligoté, étranglé leur alter, à n’en garder plus que l'ego. Dictature, ils ont dicté la culture. Ils ont soufflé dans le vent, aimé dans le vide. Ils ont appelé cela régner. Il n’y avait plus d'état normal, mais il y avait l'Etat-dirigeable, et lui savait où les diriger. Dans le mur. Ils ont fermé les yeux et ils l'ont cogné, ce mur, il est tombé. Alors, et l'Etat-dirigeable voyait juste, il fallait enrôler. Là où les pierres tombaient, il fallait mettre du béton armé. J’ai vu mes enfants s'éloigner. Mes propres tripes s’étrangler.

Une poignée d’Etres encore insoumis, c’est tout ce qu’il me restait pour sauver l’humanité. Je les ai élevé, leur ai donné la force, les ai forcé à s’élever. Acte sadique, comportement masochiste, grande phrase et petite rythmique ; les résistants-résidus n’ont cessé de fouler ma surface. En mesure débridée, ils ont crié, déchanté, prié, chanté mais jamais ne se sont pliés. Ils sont devenu loups, majestueux mais dans l'ombre, rejetés mais dangereux. Je les ai aimé jusqu'à ne considérer plus qu'eux, mais du loup ou de l'agneau corrompu, ils n’ont jamais su qui de ces deux, faisait partie la silhouette assoupie dans leur lit. C'est pourquoi ils voient la vie à cet instant comme je l'ai toujours vu. Un jeu qu'ils n'ont pas gagné, mais que qu'ils sont loin d'avoir perdu.

Tethaley était un noyau de liberté et de tolérance en bord de mer. Mais trop fragile, celle qu'on surnommait la Bulle, fut avalée par les révolutions et leur marée humaine. Car un trop plein de liberté, même mut d'intentions louables, universelles, provoque d'inévitables erreurs. Le conflit des générations fut alors trop violent, trop rapide. Là où certain devinrent chiens fous, ivres de toutes barrières abolies, d'autres prirent peur que l'horizon incarne soudain leur seule limite. Et ce furent ces derniers qui prirent le pouvoir. Est-il nécessaire d'expliquer ce qu'implique un nouveau régime réactionniste ? Avez-vous vraiment besoin de la définition d'un totalitarisme et de son quotidien liberticide ? La résistance qui en découle, à tout niveau, est elle évidente. Mais rien n'assure qu'elle sera gagnante. Lorsqu'à peine ouvertes, les portes d'un vivre libre et égaux sont refermées, la lutte entre la déception amer et le sentiment de sécurité retrouvée est lancée.

Tethaley, était la capital d'un minuscule du Mesyë, pays coincé entre la Lybie et l'Égypte. Ce pays, réserve de pétrole très courtisée par le reste du monde, vivait dans un équilibre relatif depuis plusieurs décennies. Terre de croisement religieux et humains, nombreux sont les peuples qui y sont venus, s'y sont installés. Les trois grandes croyances monothéistes ont réussi, bon grès malgré, à cohabiter et à s'entendre. La population quand à elle, tout particulièrement à Thelathey, représentait un métissage complexe, alliant des physiques venus de bien des pays : Algérie, Espagne, Israël, France, États-unis, Maroc, et bien d'autre encore. La population la moins représentés étant certainement les asiatiques. Le commerce du pays reposait principalement sur ses réserves de pétrole et sur les divers industries implantées par de grosses compagnies internationales. Malgré une qualité de vie assez correct, lorsque le printemps arabe commença, le peuple se rebella contre la famille les gouvernant depuis plusieurs générations. Une période d'allégresse absolue s'installa pendant quelques mois mais un coup d'état finit par installer le régime dans lequel se situe notre contexte.

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